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Luiz Fernandez: la boulangerie du 21ème siècle

Cet article est paru initialement dans le numéro n°37 du bulletin de l’Amicale Calvel, en juin 2014

Lors du dernier salon Europain, un groupe de jeunes apprentis boulangers, bavardant avec Louis Fernandez, lui demandèrent
ce qui lui paraissait caractériser la boulangerie du 21ème siècle. Sans hésiter, il leur répondit : « conserver la tradition qui a fait la réputation de la boulangerie française, mais en intégrant dans les process de fabrication les résultats de la recherche et du développement scientifique ».

Une carrière dans l’industriefripan_logo

Ainsi peut-on définir le parcours professionnel de Louis : alliance de la modernité et de la tradition. Originaire de la banlieue montpelliéraine, Louis devient apprenti boulanger dans les années 1976. Il entraînera dans cette voie, qui n’était pourtant pas celle de sa famille, deux de ses neveux, tous passionnés par leur métier. Le CAP le conduit vers le brevet de maîtrise, et les hasards de la vie vers l’Espagne où il est la cheville ouvrière de la création de deux très importantes unités industrielles: Fripan et Bellsola.

bellsola_logoQuelques années plus tard, ses pas le poussent vers la Pologne où il contribue également a la création de petites usines. Son solide bon sens et sa connaissance des marchés le conduisent à créer ses propres entreprises. Ainsi, dans les années 1992-1994, il crée Technoline, bureau d’études consacré au transfert de technologie et Forbaker, formulation et commercialisation d’ingrédients.

Il résultera de l’activité de ces sociétés un palmarès éclatant. les missions conduisent Louis en Amérique latine, en Asie et aux États-Unis, appelés par des sociétés importantes comme, par exemple,  Vieria’s Bakery.

Parallèlement, il contribue à la création d’une chaîne de sandwicheries dans le sud de la France, d’usine de boulangerie au Maroc, d’une autre aux États-Unis, et enfin la dernière en 2006 en Pologne pour le groupe Carreleur.

Ce globe-trotteur forge peu à peu sa conviction que la boulangerie française bénéficie d’une image recherchée le travers le monde entier et, s‘il regrette qu’elle soit assez peu valorisée par les services officiels, il demeure persuadé que ce sont les valeurs civilisationnelles que véhicule le pain français qui en font sa réputation.

Recherche et développement

Toutefois, n‘étant pas nostalgique d’un passé mythique, Louis est constamment à la recherche des méthodes de fabrication les plus modernes qui, non seulement, conservent au produit toutes ses qualités, mais peuvent également apporter des bénéfices à la santé des consommateurs, notamment en réduisant les teneurs en sucre, en sel, en matières grasses.

Fort de ses convictions, il saisit l’opportunité de la création du parc scientifique autour de l’université de Gérone (Espagne) pour imaginer et développer un laboratoire de Recherche et Développement. Ainsi peuvent être alliés la recherche fondamentale des universitaires, et les «tâtonnements » des boulangers.

L’évolution du métier de boulanger

L’empirisme doit s’effacer devant la rationalité, ou plutôt l’artisanat ne peut survivre que dans le cadre de pratiques techniques mieux contrôlées.
Ainsi, dans son école de boulangerie de Gérone, les étudiants en troisième cycle universitaire côtoient les compagnons boulangers, sans hiérarchie de statut.  Les deux approches se complètent vers un seul objectif : le meilleur produit. Les résultats ayant dépassé les prévisions les plus optimistes, cela se traduit par des sollicitations toujours plus pressantes. Mais pour cela, il est indispensable que le boulanger maîtrise parfaitement tous les aspects de la technologie, et que par ailleurs, les scientifiques aient la modestie de ne pas «jargonner ».

Cette relation équilibrée pose de manière criante le problème de la formation initiale des boulangers. La complexification des procédés de fabrication, qui ne peuvent pas reposer sur le seul « tour de main », implique soit d’accroître le niveau initial d’entrée en apprentissage, soit d’augmenter le temps de la formation en séquences qui peuvent ne pas être nécessairement continues.

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Les conceptions « à courte vue » qui ignorent l’environnement mondial sont rattrapées parla réalité . C’est ainsi que, au-delà de la connaissance des techniques du métier, la maîtrise d‘une langue vivante devient fondamentale. En effet, il y a une pénurie de boulangers français parlant une langue vivante, malgré une demande toujours plus importante. A titre d’exemple, un poste rémunéré 4.000 euros nets en Australie n’a pas pu être pourvu par un français.

Ainsi se dessine le profil du « boulanger nouveau ». Ce sera un professionnel de haute qualification scientifique et technique, pouvant parcourir le monde pour enrichir son expérience, Aujourd’hui, Louis est sollicité pour créer des centres de production en Asie du Sud-Est, et en même temps il rassemble des énergies pour créer, en Europe, un atelier de substituts de pain sans gluten .

La boulangerie est un noble artisanat destiné a produire la nourriture des hommes. Elle s‘ancre dans une histoire aussi vieille que l‘Humanité. La Science doit lui permettre de trouver un souffle nouveau, bien que les éléments fondamentaux qui la structurent soient permanents : la terre, l’eau, le feu, la mort et la renaissance du grain de blé, tout cela sublimé par la main de l’homme et le goût de la perfection.

Luis Fernandez